
Pour débuter cette nouvelle année, c’est le vidéaste plasticien Jésus S.Baptista qui prend possession de notre couverture ce mois-ci. Strasbourgeois d’adoption depuis sept ans, il nous emmène à la découverte de son parcours, de son travail et de ses rencontres.
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Question ô combien épineuse pour Jésus S.Baptista qui travaille notamment autour de l’identité. Né en banlieue parisienne, ses parents sont portugais et arrivent en France à la fin des années 80. Il se rappelle de cette distance, des envois postaux, des coups de téléphone à la famille, de la difficulté de la rencontre, d’échanger et de se voir. Un éloignement qui semble différent de celui d’aujourd’hui avec l’accès à internet. Une distance que l’on a tous pu vivre en étant éloignés physiquement ou non avec les confinements de 2020. La question des relations, de l’identité, de ce qui nous constitue, nous construit, de notre habitat, où sommes-nous chez nous ? Ce sont des thèmes qui animent Jésus et forcément son travail.
Jésus grandit donc en banlieue parisienne, il se dirige rapidement vers les arts appliqués et commence le graffiti dès l’âge de 12 ans.
« Au collège on avait chacun son truc, c’était un mode d’expression, l’un avait la musique, l’autre le skateboard… Un grand m’a filé une bombe et c’est comme ça que j’ai commencé ! »
Une pratique qui amène chez lui un attrait tout particulier pour l’architecture et les grands bâtiments bruts fait de béton, laids au premier abord, mais qui peuvent se révéler d’une grande beauté.
Comme beaucoup de trentenaires, une plateforme internet a été déterminante dans son parcours : la fameuse plateforme post bac ! Jésus se retrouve finalement à Chaumont, 7e choix sur la liste pour un BTS Communication Visuelle. Coup du destin déterminant, puisque c’est grâce à cette expérience qu’une de ses amies l’emmène à Strasbourg, lui fait visiter la ville, les Arts Déco où elle étudie et la Mine. C’est alors décidé : « Soit je vais dans cette école, soit je commence à travailler ». Il postule donc à l’atelier de Didactique visuelle de la Haute École des Arts du Rhin et c’est comme ça que l’on retrouve Jésus à Strasbourg aujourd’hui encore !
Il y passe trois années comme un poisson dans l’eau. L’ambiance, le matériel disponible, les professeurs et assistants à l’écoute, tout s’y passe pour le mieux. Un véritable déclic se fait pour lui autour du travail de la vidéo. Il y découvre également l’atelier bois et commence à réaliser des structures pour y projeter de la vidéo mais reste encore contraint par la technique. Après trois ans dans cette bulle, Jésus part en échange au Brésil. Il y réalise un documentaire : Rien de spécial au Brésil que vous pouvez découvrir sur youtube.
De retour à Strasbourg, ses études terminées, il garde un pied à la Hear en devenant assistant. Une respiration après les trois années où s’entremêlaient les cours, les travaux et son job étudiant. Cette année a été cruciale : il prend conscience du cocon qu’il s’était créé aux Arts Déco et commence à partir à la rencontre de Strasbourg, à s’ouvrir aux autres endroits de la ville et aux autres.
Un soir, en regardant le mapping sur la cathédrale de Strasbourg, un autre déclic opère, « j’aimerais bien faire quelque chose comme ça ».
De fil en aiguille, de rencontres en rencontres, se créent pour lui des projets et perspectives intéressantes, ce qui le pousse à rester à Strasbourg.
« Je commence à me sentir chez moi à Strasbourg »
Aujourd’hui de toutes ces rencontres, se sont créées des opportunités professionnelles. Jésus couvre notamment des événements pour lesquels il réalise photos et vidéos, collabore avec des musiciens, il réalise aussi des reportages pour la presse, notamment pour le magazine Zut et travaille avec le collectif AV Exciters en plus de développer ses projets de plasticien.
Av Exciters, c’est un collectif strasbourgeois qui cherche à transmettre une expérience immersive de l’Architecture, notamment grâce à l’outil audiovisuel. Des thématiques qui forcément résonnent avec la démarche de Jésus. La rencontre avec ce collectif a été déterminante pour lui en termes de technicité et d’univers. Au-delà de la relation purement professionnelle s’est créée une amitié véritable et même un rapport maitres Jedi/padawan avec Jérémie Bellot et Josselin Beaumont.
La rencontre et l’échange tiennent une place considérable dans le travail de Jésus : dans ses projets il s’accompagne de designers, de musiciens, des relations qui deviennent finalement des amis. Une autre rencontre l’emmène en résidence durant presque un mois sur un bateau au Groenland. Une expérience forcément incroyable. L’idée de cette résidence était de capturer des aurores boréales pour les mettre dans des boîtes. Un projet qu’il mène avec son ami et designer Philippe Zappadu et qui sera bientôt mené à son terme à travers la présentation d’un film et d’installations.
Son travail de plasticien mêle art contemporain et art numérique. Concrètement, Jésus S.Baptista réalise de micro architectures lumineuses, des installations physiques animées de projections vidéos lumineuses ou plus graphiques. Ses formes s’adaptent à l’espace qui lui est proposé. L’adaptation est sans doute l’une des réponses à son questionnement sur l’identité. Comme de l’eau qui s’adapte à son environnement, à son contenant, l’identité pour lui est en perpétuelle mutation. Pour Jésus S.Baptista « L’identité est un processus de construction qui se met en place en contact avec les autres ». Son parcours témoigne plutôt bien de cette pensée. Notre identité se forge au fil de notre parcours, des histoires que l’on vit, des rencontres que l’on fait. Elle se construit, se déconstruit dans l’échange ou dans la lutte, faite de glissements et de dualité.
On retrouve cette dualité dans l’esthétique de ses projets qui mêlent brutalité de la matière en confrontation avec des éléments plus naturels. Dans ses installations, le spectateur s’immerge dans des mondes imaginaires fait de volumes aux formes graphiques sur lesquelles se projettent des images plus douces, le tout dans une ambiance sonore singulière. Une confrontation entre l’aspect industriel, dur et brut et la légèreté des notes naturelles. Une opposition qui nous renvoie aussi à ses premières expériences de graffeur lors desquelles l’architecture, imposante et bétonnée, avait une part importante.
Vous avez déjà pu voir son travail au Shadok dans le cadre de l’exposition Hier c’était demain : science-fiction et imaginaires collectifs, lors du festival Makerland 2020 où il projetait sous un dôme une expérience immersive visuelle en 360° ou plus récemment à la HeK (Haus der elektronischen Künst) à Bâle où il exposait l’installation Burst ice cubes. Ses projets sont fortement marqués par les écrits de Nicolas Rouyer, par l’univers poétique de Jean-Simon Roch mais aussi par le travail des collectif AV Exciters et Tetro. Jésus S.Baptista se nourrit de différentes choses, notamment pour s’inspirer en termes de lumière, textures et cadrages. Il aime particulièrement le travail du photographe Christophe Urbain.
Le 7 janvier sort le film réalisé durant sa résidence au Groenland. Celui-ci est disponible sur demande, pour le découvrir il vous suffit d’envoyer un message à Jésus. Ce travail est également accompagné d’une installation, à découvrir prochainement on l’espère dans un lieu d’exposition. Pour cette nouvelle année, Jésus S. Baptista entame également un projet de résidence en milieu scolaire intitulé Ma Cabane, ma Cathédrale (preuve s’il en fallait qu’il est réellement devenu strasbourgeois) !
Il poursuit aussi un projet autour de l’exoplanète K218B. Une planète réelle et potentiellement habitable mais trop éloignée pour que ce soit réellement possible. Le projet a débuté en octobre dernier lors d’une résidence à Bliiida à Metz durant laquelle l’exoplanète a été modélisée en 3D avec des projections vidéo. Le second temps de ce travail a été présenté lors de la projection immersive durant le festival Makerland, projection lors de laquelle on arrivait sur cette planète. Le troisième temps de ce projet se tiendra lors du festival Constellations de Metz, cette fois on sera sur la planète !
Une série de trois sculptures doit également arriver au printemps !
Pour suivre tous les futurs projets de Jésus S.Baptista, rendez-vous sur :
https://www.instagram.com/jesus_s.baptista/?hl=fr
http://jesusbaptista.fr/
TEST DU TAC AU TAC
Ton film préféré ? La Cité de Dieu
Ton lieu favori en Alsace ? Les Arts Déco
Un mot qui résume l’année 2020 ? Merde
Que te souhaites-tu pour 2021 ? Que rien ne soit annulé
Un conseil ? Il faut se lancer, ne pas avoir peur